Témoignage de Bruno et Delphine
Célibat géographique : quelle vie cette expression cache-t-elle ?
Bruno et Delphine, sont les parents de trois enfants. Saisissant une opportunité professionnelle, Bruno est parti travailler, seul, dans un pays de l’Est et revient une à deux fois par mois. Rien de très exceptionnel dans cette situation, tant elle a tendance à se généraliser.
Ils ont accepté de témoigner. Je leur ai laissé la parole en leur demandant de me parler de ce qu’ils ont pu découvrir à travers cette expérience.
Ça y est, il est parti! Il reviendra dans 15 jours.
[Delphine] Ce matin-là, assise devant ma table de cuisine, je me demande comment va se dérouler cette séparation. Voilà deux ans que je me remémore cette scène, après notre choix commun d’accepter ce nouveau cadre de vie. [Bruno] Même s’il continue à dire parfois « J’ai l’impression d’être nulle part !», nous nous sommes adaptés.- Un premier étonnement : l’avis des autres sur notre choix.
« Tu ne lui fais pas un peu trop confiance à ton mari, tu n‘as pas peur qu‘il te trompe avec Adriana ? » « Tu es gonflé, la vie va être belle pour toi ! Tu abandonnes femme et enfants ».
Ensemble nous sommes tombés des nues à l’écoute de ces réflexions. Elles ont tout de suite renforcé notre besoin de « Faire Couple » devant les autres.
A ces questions sur une éventuelle infidélité notre solution fut de renvoyer la question : Pourquoi pensez-vous cela ? Et vous, vous ne vous faites pas confiance entre vous ?
[Bruno] Pour nous, il était clair que cette vie serait impossible si nous avions commencé à monter la garde. Au contraire, nous avions le désir sincère d’être à la hauteur de la confiance donnée par notre partenaire.De plus, nous ne voulions pas vivre cette séparation comme un abandon pour celui qui reste. Pour ce faire, nous avons mis en place des choses toutes simples :
- Mise en place régulière d’un dîner familial via internet, le décalage horaire y étant, il est vrai, favorable.
- Prendre le temps de nous raconter les moments importants qui ont eu lieu pendant l’absence. Pour que Bruno ne se sente pas exclu de la vie de famille et pour que Delphine et leurs enfants puissent toucher du doigt sa vie loin de la maison.
- Ouverture d’un groupe WhatsApp familial, qui est devenu un vrai outil de communication, sans devenir, heureusement, une boite fourre-tout. Après un démarrage balbutiant, nous nous sommes vite retreints, parents et enfants, à ne poster que des messages intéressants.
- Un impératif: continuer à prendre les décisions à deux, à être parents ensemble.
[Delphine] L’absence physique ne doit pas nous faire oublier de continuer à prendre des décisions à deux. Des situations qui nous semblent évidentes, à nous, adultes, doivent être explicitées aux enfants.Nous devions faire comprendre aux enfants que Bruno est là, même s’il n’est pas présent tous les soirs. Nous avons souhaité leur montrer que nous faisions toujours Couple, ne serait-ce que par des phrases simples, à suivre bien sûr par des actes. [Bruno] Cela n’a pas été évident au début mais, après quelques semaines, nous nous sommes rendu compte de l’importance de parler d’une même voix.Au lieu de dire aux enfants « écoute ta mère quand je ne suis pas là », j’ai systématiquement voulu mettre ma confiance en Delphine au centre des décisions. J’ai préféré leur dire « je fais confiance à ta mère quand je ne suis pas là. »
[Delphine] Moi aussi, j’ai souhaité que nos enfants comprennent que les décisions prises étaient celles de notre couple. « Même si ton père n‘est pas là, je peux compter sur lui. Il me téléphone tous les jours et si tu n’as pas le droit de rentrer plus tard cette décision nous l‘avons prise ensemble. » - Un enjeu prioritaire: donner de la Valeur à notre relation de couple.
Nous avons compris l’importance de prendre le temps, à chaque week-end de retour en France, de bien comprendre les attentes de chacun. Sans ce temps, nous ne pourrions que créer que de la frustration chez l’un et chez l’autre, faisant disparaître le désir de se retrouver.
La distance imposée nous a enfin demandé de la persévérance pour ne pas lâcher.
Notre conclusion sur le Célibat géographique.
Cette notion de célibat géographique ne nous plait pas car nous ne nous sentons en rien célibataire.
Pour nos enfants, la mise en place de nouveaux outils et modes d’échanges sont une des premières richesses de cette expérience.
Pour notre couple, ces deux années nous ont permis de renouveler notre mode de communication, de ne plus mettre au lendemain les discussions importantes et de mieux discerner notre projet de couple pour les années à venir.
En conclusion, nous ne savons pas comment nous aurions évolué sans cette séparation, sans doute de la même façon, mais peut-être pas au même rythme. En tout cas nous sommes ravis d’avoir pu mettre en place une communication ouverte et régulière qui nous a permis de renforcer notre couple.